Chroniques

par samuel moreau

Wolfgang Amadeus Mozart
Mitridate, re di Ponto | Mithridate, roi du Pont

1 DVD EuroArts (2005)
2053609
une distribution d'une grande homogénéité de couleur

Fin 1769, Leopold Mozart et son fils Wolfgang quittent Salzbourg pour un voyage italien qui mènera le jeune prodige de treize ans de Vérone à Bologne, de Rome à Milan... C'est pour le Teatro Regio Ducale de cette dernière qu'il écrivit Mitridate, re di Ponto, d'après le texte du Turinois Vittorio Amedeo Cigna-Santi, simple adaptation d'une traduction italienne de la pièce de Racine – qui venait d'être mise en musique par Quirino Gasparini, en 1767. Selon les usages de l'époque, Mozart écrivit d'abord les récitatifs puis conçu les airs en fonction des chanteurs engagés par cette grande scène lyrique. L'opera seria en trois actes voit le jour le 26 décembre 1770, pour l'ouverture de la saison. Le succès est au rendez-vous, donnant lieu à une vingtaine de représentations. Deux siècles d'oubli suivirent, jusqu'à la reprise d'août 1971, au Festival de Salzbourg.

Au bord de la mer Noire, deux siècles avant Jésus-Christ, Mithridate, roi du Pont, résiste à l'invasion romaine. Croyant leur père mort dans une de ses batailles, Farnace et Sifare espèrent en les faveurs d'Aspasia, la fiancée du défunt. Mais le roi revient. Tandis que Sifare se résout à s'éloigner de son élue, l'aîné fomente un complot avec le Romain Marzio, tout en refusant une union avec Ismène, princesse de Parthie qu'on veut lui imposer. Une ruse lui ayant appris l'affection d'Aspasia pour Sifare, Mithridate décide d'une condamnation commune, cependant reportée par l'annonce d'un débarquement imminente. Mithridate, accompagné par Sifare et Farnace repentant, part à un combat où il trouvera la mort. Il aura le temps d'apprendre l'incendie, par l'aîné, de la flotte romaine et de bénir l'union de son cadet avec Aspasie.

Conçue pour l'Opéra de Zurich en 1983, la production du metteur en scène Jean-Claude Fall s'installe à Lyon trois ans plus tard. En costume exotique, les chanteurs évoluent dans le décor sobre d'une forteresse (Gérard Didier) – une scène couverte de sable, avec quelques fauteuils et une sculpture.

La distribution apparaît d'une grande homogénéité de couleur (quatre sopranos, deux ténors) et de technique. Seul Rockwell Blake (le rôle-titre), malgré son beau timbre, détonne par une vaillance vériste, quelques attaques miaulées, des passages à l'aigu hurlés. Yvonne Kenny (Aspasia) possède un chant d'abord fade et froid, mais qui devient plus touchant après le premier acte – de même pour le contralto Brenda Boozer, d'abord raide dans ses vocalises. Patrizia Rozario (Ismène) livre de belles vocalises, d'un timbre chaud et rond, qui manque peut-être de nuances. Pourvue d'une voix large et tonique, Ashley Putnam (Sifare très expressif) apparaît comme la vedette incontestée de la soirée. Vif et alerte, Theodor Guschlbauer met l'Orchestre de l'Opéra de Lyon au diapason de ses invités.

SM